PREEMPTION – En cas de préemption illégale, la commune doit indemniser les propriétaires vendeurs
Catégories : Préemption
Tags : commune, avocat, responsabilité, préjudice, immeuble, DIA, déclaration d’intention d’aliéner, préemption, acquéreur, droit de preemption urbain, décision de préemption, propriétaire vendeur
En cas de vente d’un bien immobilier, le propriétaire ou son notaire doit déposer en mairie une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) décrivant les caractéristiques de la vente projetée (identification du bien, prix, modalités de rémunération de l’agent immobilier…).
A compter de l’enregistrement en mairie de la DIA, le titulaire du droit de préemption dispose de deux mois pour informer le propriétaire (ou son notaire) de sa décision de préempter (ou pas) le bien immobilier, et de se substituer ainsi au candidat à l’acquisition pour un prix déterminé (soit au prix mentionné dans la DIA soit pour un prix inférieur).
Il aura évidemment à recueillir, au préalable, l’avis du service des Domaines (sur l’estimation de l’immeuble) et pourra solliciter de visiter le bien et/ou de demander au propriétaire vendeur des pièces supplémentaires sur le bien immobilier (cf notre précédent article à ce sujet).
Il devra aussi justifier dans sa décision que le droit de préemption est exercé en vue de réaliser, dans l’intérêt général, une action ou opération répondant aux objets définis à l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme (Conseil d’Etat, 7 mars 2008, Commune de Meung sur Loire, req n°288371).
Autant de formalités et de motifs qui rendent une décision de préemption délicate et susceptible d’être annulée pour illégalité par le juge administratif (sur recours du propriétaire vendeur ou de l’acquéreur évincé).
Même illégale, la décision de préemption de la collectivité conduit souvent le candidat à l’acquisition à renoncer à acquérir le bien, causant ainsi préjudice aux vendeurs du fait de la non réalisation de la vente projetée.
Dans sa décision du 7 mai 2015 (CE, 7 mai 2015, req n° 371915), le Conseil d’Etat confirme que ce préjudice est bien en lien direct et certain avec l’illégalité de la décision de préemption et engage la responsabilité du titulaire du droit de préemption envers les propriétaires vendeurs.
Dans cette espèce, la décision de préemption était illégale car "la commune ne justifiait pas de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement entrant dans le champ de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme".
Le tribunal administratif avait ainsi condamné la commune à payer aux vendeurs une indemnité correspondant aux intérêts au taux légal sur le prix de vente dont ils avaient été privés, plus une indemnité pour frais de procédure.
Cependant la cour administrative d’appel avait annulé ce jugement en considérant qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre le préjudice subis par les propriétaires vendeurs et l’illégalité de la décision de préemption.
C’est cette partie du raisonnement de la cour que le Conseil d’Etat remet en cause en cassant l’arrêt d’appel :
« Eu égard … au fait que la décision de préemption illégale avait seule été à l'origine de l'échec de la transaction qui devait être conclue le 12 septembre en vertu d'une promesse valable jusqu'au 18 septembre et des difficultés particulières auxquelles M. et Mme A...avaient dû faire face du fait de cet échec, [la Cour administrative d’appel] a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant qu'il n'existait pas de lien de causalité direct et certain entre la décision de préemption illégale et le préjudice dont les intéressés se prévalaient ».
Le Conseil d’Etat renvoie donc les parties devant une cour administrative d’appel notamment pour que soit tranché le montant de l’indemnité due aux propriétaires lésés.
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