EXPROPRIATION: La renonciation par l’occupant exproprié à son droit au relogement doit être claire et non équivoque
Catégories : Expropriation
Tags : expropriation, proprietaire, procedure, avocat, occupant, indemnité, indemnite principale, fixation, relogement, renonciation, expropriant, depossession, alternative
Lorsque son opération d’expropriation touche des immeubles d’habitation (maisons ou appartements), l’autorité expropriante a l’obligation de proposer un relogement à chacun de leurs occupants (articles L 423-2 et suivants et R 423-1 et suivants du code de l’expropriation relatifs au droit au relogement des expropriés et L. 314-1 et suivants du code de l’urbanisme relatifs à la protection des occupants).
Précisément, ce droit au relogement protège tous les occupants de bonne foi de l’immeuble exproprié (au sens de l’article L 521-1 du code de la construction), qu’ils en soient propriétaires, locataires titulaires d’un bail d’habitation, ou simples occupants (hôtels meublés)…
Ainsi, l’expropriant doit obligatoirement notifier deux offres de logement, à chacun des occupants expropriés (article L 314-2 du code de l’urbanisme), au moins six mois à l’avance (article L 314-7 du code de l’urbanisme).
Bien souvent, l’autorité expropriante s’abstient de formuler la moindre offre de relogement aux occupants et se garde même de mentionner ce droit au relogement dans ses contacts avec les expropriés.
Ainsi, pour prendre possession de l’immeuble exproprié, l’autorité expropriante préfère concentrer ses démarches sur la fixation des indemnités d’expropriation.
Pour se prémunir de l’impact éventuel d’un relogement de l’exproprié sur l’estimation de la valeur vénale du logement (indemnité principale), sans avoir à formuler d’offre de relogement, l’expropriant demande fréquemment au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité principale de façon alternative.
Ainsi l’expropriant demande au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité principale en valeur libre (sans relogement du propriétaire exproprié) ou en valeur occupée (avec relogement du propriétaire exproprié), en revendiquant un abattement réduisant artificiellement la valeur vénale de l’immeuble (pour la valeur occupée).
L’expropriant invoque souvent cette alternative, pour inciter l’exproprié à renoncer à son droit au relogement, lors de la procédure en fixation des indemnités d’expropriation devant le juge de l’expropriation, et économiser des démarches de recherche de solutions de relogement.
Dans ce cas, l’autorité expropriante demande que l’indemnité principale soit estimée en valeur libre « sous réserve de la renonciation expresse par l’exproprié à être relogé ».
C’est justement dans un tel contexte que la cour de cassation a rappelé le caractère fondamental du droit au relogement et ses conséquences.
En effet, en présence d’une offre d’indemnité alternative de la part de l’expropriant, une cour d’appel avait constaté que le propriétaire occupant exproprié demandait, pour sa part, l’évaluation des indemnités d’expropriation « en valeur libre ». Elle en avait déduit que l’exproprié renonçait implicitement à être relogé et s’était donc contentée d’évaluer l’immeuble exproprié en valeur libre d’occupation.
Dans son arrêt du 16 mars 2022 (cour de cassation, 3e ch civ, 16 mars 2022, 21-1032), la troisième chambre civile de la cour de cassation, réunie en formation plénière, a censuré l’arrêt de la cour d’appel en considérant qu’elle n’avait pas constaté une renonciation claire et non équivoque de l’exproprié à bénéficier à son droit au relogement : Gilles CAILLET avocat expropriation
►La renonciation par le propriétaire exproprié à son droit au relogement doit être claire et non équivoque
« Vu l'article R. 423-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : expropriation avocat
Selon ce texte, il ne peut être offert un local de relogement à un propriétaire exproprié qui occupe tout ou partie de son immeuble que si cette offre a été acceptée par ce propriétaire avant la fixation des indemnités d'expropriation, afin de permettre au juge et, le cas échéant, à la cour d'appel, de tenir compte de ce relogement lors de la fixation des indemnités d'expropriation.
En outre, si la renonciation à un droit peut être tacite, les circonstances doivent établir, de façon non équivoque, la volonté de renoncer (1re Civ., 23 septembre 2015, pourvoi n° 14-20.168, Bull. 2015, I, n° 221).
Pour évaluer le bien exproprié uniquement en valeur libre d'occupation, l'arrêt retient qu'il est occupé par M. Y, qui sollicite une évaluation en valeur libre et renonce donc à être relogé.
En statuant ainsi, sans avoir constaté une renonciation claire et non équivoque de l'exproprié à bénéficier de son droit à être relogé, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »
La procédure en fixation de l’indemnité de dépossession (indemnité principale) est donc renvoyée devant la cour d’appel (autrement composée) pour être tranchée de façon alternative.
Pour conclure, il est important de rappeler que la fixation d’une indemnité principale de façon alternative n’est absolument pas inéluctable, surtout si l’autorité expropriante a suffisamment anticipé et mis les occupants expropriés en mesure de se déterminer sur des offres de relogement.
Autrement dit, pour faciliter le débat devant le juge de l’expropriation sur la fixation de l’indemnité principale et éviter la fixation de l’indemnité principale de façon alternative, il suffirait que l’autorité expropriante prenne l’initiative de formuler des offres de relogement aux expropriés, suffisamment longtemps avant de saisir le juge de l’expropriation en fixation d’indemnités. avocat expropriation
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